Trois mineurs périssent ensevelis sous un éboulement 8/4/1932 à la Clarence

 

Un sauveteur nous dit..

Nous avons pu joindre dans la journée un des hommes qui, arrivé le premier sur les lieus, coopéra le plus activement aux travaux de sauvetage. Il s'agit de M. André Grattinoix travaillant à la veine 7, étage 1000. J'étais, nous dit-il, occupé à « rocher » quand vers 1 h 15 on cria que quelqu'un était pris. C'était Marcowiak qui donnait l'alarme. Rapidement je me rendis sur l'es lieux. Aussitôt j'aperçus Sawinski ; il se trouvait en quelque sorte pendu entre deux rondins qui, au cours de l'éboulements s'étaient coincés à la hauteur de son cou ; il était donc mort debout et comme étranglé. Nous sciâmes l'un des rondins et nous pûmes, avec l'aide d'autres camarades survenus entre-temps, le dégager assez rapidement mais il était trop tard.

Le sauvetage des deux autres compagnons dura un peu plus longtemps en raison de l'enchevêtrement des bois et des terres. Quand on les découvrit ils étaient accroupis dans la position habituelle du mineur.

Ce qui fut surtout très long et particulièrement pénible, ajoute M. Grattinoix, ce fut de transporter les corps sur une civière dans les galeries étroites, jusqu'à l'accrochage. Il nous fallut plus d'une heure.

M. Grattinoix estime que l'accident est dû à un mouvement de terrain, lequel aurait d'ailleurs été perçu à la surface.

Les quatre ouvriers étaient occupés réparer ce que l'on appelle une  « fondrée », c'est-à-dire qu'un premier éboulement s'était déjà produit. L'endroit était donc assez dangereux, néanmoins c'est un travail que l'on effectue souvent dans les mêmes conditions.

On a des raisons de conjecturer qu'ils furent avertis du danger mais n'eurent pas le temps de se garer. En effet, Marcowiak - avait constaté que du « menu » tombait du plafond. Le a "menu " est une sorte de poussière mélangée de petits cailloux et qui précède généralement l'éboulement de quelques secondes. Il annonce le danger et, quand les mineurs occupés à des travaux de boisage s'aperçoivent de sa présence, la prudence le fait se garer aussitôt. Neuf fois sur dix ils ont raison.

Dont hier, Marcowiak fut, dit-il, le premier à constater le mouvement de terrain par la chute du menu. « Vient par ici, ça dégringole s'écria-t-il à Sawinski. Hélas, à peine ce dernier effectuait-il son mouvement de retraite, qu'un craquement sinistre se fit entendre ; tout le boisage mélangé de gros cailloux Vint choir aux pieds de Marcowiak, ensevelissant ses trois infortunés compagnons de travail. La mine avait inscrit trois nouvelles victimes sur sa liste déjà longue:

 

Source :Le Télégramme du PdC et de la Somme 

Un éboulement

Donc, vers 1 h 30 du matin, 4 ouvriers étaient occupés dans la voie 7 de la fosse no 1 à des travaux de réparation de boisage, travaux appelés communément « coupe de terre ». C'était le Français Auguste Potier, 35 ans, les Polonais Thomas Sawinski 51 ans et Pierre Markowiak, 50 ans ainsi que l'Algérien Mohamed Merzoud, 28 ans. Au mines de la Clarence c'est à plus de 100 mètres sous terre que s'extrait le charbon. Une pierre soudainement se détacha de la toiture, provoquant un premier éboulement que les ouvriers parvinrent à endiguer ; mais la masse formidable de terre s'appesantit à nouveau sur les bois qui cédèrent. Auguste Potier et Thomas Sawinski furent immédiatement recouverts. L'Algérien Merzoud. qui travaillait un peu à l'écart avec, Pierre Markowiak, tenta de se sauver, mais dans sa précipitation il prit la mauvaise direction et alla se jeter sous la fissure où il fut enseveli avec ses deux autres compagnons de travail, sous un amas de terre et de décombres. Plus heureux, Markowiak avait emprunté une direction opposée ; il se tira sain et sauf de cette terrible situation et donna aussitôt l'alarme.

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Le dégagement des corps

Sous la direction de MM. Delage et Vandeputte, ingénieurs et de MM. Acheret, chef-porion et Sevin, porion, les secours s'organisèrent. Tous les ouvriers présents et occupés au même, travail de réparation des diverses voies car on n'extrait les de charbon la nuit 'aux mines de la Clarence y coopérèrent avec une célérité et un zèle dignes d'éloges. Mais de tels travaux sont infiniment délicats et ce  n'est qu’après une heure d'efforts patients que le premier put pu être dégagé Le dégagement du corps. C’était le polonais Thomas Sawinski Hélas on ne retirera qu’un cadavre

Le dégagement de  M. Auguste Potier nécessita encore une longue heure de travail pénible. Quant à Merzoud, on ne put le dégager qu'au petit jour

Les trois corps, après avoir été nettoyés furent reconduits aux domiciles mortuaires dans la voiture ambulante de la Compagnie des Mines.

Le docteur Henaux qui avait été prévenu pour le cas où son concours eut été nécessaire procéda aux constatations légales au fur et à mesure de la découverte des corps des malheureuses victimes. Ce praticien estima que la mort avait les causes suivantes : pour Potier une compression thoracique ayant provoqué la mort par asphyxie ; il constata en outre sur le corps des plaies et érosions multiples. Sawinski était mort d'une fracture de la colonne vertébrale cervicale ; il avait aussi des contusions à la face. Quant à l'Algérien Merzoud, il avait eu, comme Potier, le thorax défoncé, mais en outre la cuisse droite était fracturée avec une plaie béante, le genou droit et l'avant-bras gauche étaient également brisés.

 

Les victimes

Voici l'identité exacte des trois ouvriers défunts : M.. Auguste Potier, 35 ans, dit Gérard, résidant rue D no 25 à La Clarence, était marié et père de 4 enfants. Il était né à Camblain-Chatelain et était occupé depuis 14 ans par la Compagnie des Mines de La Clarence. Il avait, voici un an, obtenu la médaille militaire. C’était un excellent ouvrier, parfaitement considéré de tous ses chefs.

Thomas Sawinski était âgé de 51 ans Il demeurait rue C. n° 41. Veuf depuis un mois à peiné, il était père de 6 enfants dont deux décédés. Arrivé en France en mai 1924, il était également considéré comme un excellent ouvrier

L'Algérien Mohamed Merzoud, 2 ans, célibataire, demeurait 14 coron Pâques à La Clarence.

Les funérailles de MM. Auguste Potier et Sawinski sont fixées  vendredi à 10 heures.

Le corps de l'Algérien Merzoud sera reconduit à son pays natal, Fort National, douar Kouriet, ainsi que sa famille en a témoigné le désir.

Ce navrant accident a causé dans la région, on le conçoit, une pénible impression.

Une enquête va être ouverte afin de situer les responsabilités, s'il y en a déterminer. Sans doute, les mesures de sécurité et de sauvegarde ont été bien prises, mais la mine est traîtresse et l'on ne saurait jamais trop s'entourer de précautions avec  elle.

 Hier, après que les opérations de déblaiement eurent été terminées le travail a repris dans la voie homicide.

 

Source :Le Télégramme du PdC et de la Somme 

Remerciement a Serge THOMAS pour ces documents

 

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