SEPT MORTS A AUCHY AU BOIS LE 7 JUIN 1873 FOSSE 2

 

L'explosion du 7 juin 1873 eut un certain retentissement dans la région et fit même l'objet d'un article important dans "les Annales des Mines".

A cette date, à la fosse n°2, une explosion de grisou se produit en fin d'après-midi détruisant et inondant totalement le puits et causant la mort de 7 personnes dont le sous-ingénieur.

Sur les 7 victimes, on retrouva 2 cadavres : ceux de

Henri LECONTE, 37 ans et de Louis DAGBERT, 23 ans.

Les 5 autres corps furent retrouvés 7 ans plus tard, en juin 1880:

Oscar BROUILLARD,29 ans,

Marcel ROMIEU, sous-ingénieur, 27 ans,

Jules LEFEBVRE, 28 ans,

Pierre LESUR, 44 ans,

Scipion REANT, 29 ans.

Les vestiges des vêtements qu'ils portaient permirent de les identifier.

 

Tiré de Auchy-au-Bois, le village au temps de la mine 1852-1890 par Pascal GUILLEMANT

 

 

MINES D'AUCHY-AU-BOIS.
L'exploitation de cette fosse fut nulle au nord, et au midi, elle porta presque exclusivement dans la seule veine Maréchale de 1 m. 10 d'épaisseur. Cette veine fut assez vite dépouillée au niveau de 194 m. et on dut recourir en 1867, pour prolonger l'extraction à un puits intérieur, creusé à 488 m. du puits principal, desservi d'abord par une machine à l'intérieur, et plus tard en 1870, par une machine à l'extérieur, avec transmission par câble en aloès d'abord et puis par un câble en fil de fer; un télégraphe électrique assurait la régularité des mouvements.
Dans de pareilles conditions la fosse N° 1 fut peu productive, pour ne pas dire onéreuse; seulement elle permit d'explorer transversalement la concession et de faire reconnaitre que les gisements houillers s'étendaient au-delà de sa limite sud et de déterminer l'emplacement d'un puits qui fut ouvert plus tard sous la désignation de N° 3.
Pendant l'année 1860, la Société exécutait une série de cinq sondages au sud de sa concession pour disputer un lambeau de la zone houillère aux Sociétés Calonne, La Modeste de Westrehem et l'Éclaireur du Pas-de-Calais. Enfin en 1862. elle ouvrait une deuxième fosse.
Située à 1,800 m. à l'ouest de la fosse N° 1, elle ne rencontra jusqu'à la profondeur de 215 m. que des veines accidentées et dont l'exploitation fut improductive. On se décida en 1867 à l'approfondir jusqu'à 431 m. et on ouvrit deux accrochages à 395 m. et 420 m. laissant 180 m. de hauteur du puits inexploité. Les galeries à travers bancs de ces étages rencontraient au sud de belles veines, assez régulières. Celles du nord atteignirent le calcaire à 200 m. du puits.
La fosse N° 2 allait enfin donner des résultats, lorsque le 7 juin 1873, pendant que l'on exhaussait le cuvelage par suite du relèvement du niveau des eaux qui se produisit cette année dans tout le bassin, une explosion de grisou eut lieu. Le sous-ingénieur,deux surveillants et quatre ouvriers occupés à ce travail périrent ; le guidage, le goyau furent détruits, et les eaux envahirent les travaux.
La réparation des dégâts fut longue et difficile. On en vint à bout, et on ouvrit de nouveaux accrochages à 270 mètres et à 312 mètres — et l'exploitation de la fosse N° 2 fut reprise en 1875.
Mais jusqu'ici elle n'a donné que de faibles résultats, et en 1878, les travers-bancs Nord et Sud sont venus lutter contre le calcaire carbonifère sans découvertes bien sérieuses.
L'accident, arrivé à la fosse N° 2, causa un grand émoi parmi les actionnaires.
Le Conseil d'administration convoqua une assemblée générale extraordinaire qui se tint le 11 aout 1873 , et dans laquelle il fut résolu de presser l'ouverture d'un troisième puits, déjà décidé en principe. Ce puits avait pour but d'exploiter particulièrement la richesse houillère reconnue par le puits intérieur de la fosse N° 1.
Il devait rencontrer, au niveau de 270 mètres, une première exploitation explorée et préparée déjà par une galerie se reliant au puits intérieur.
Trois sondages furent exécutés en 1873 en vue de déterminer l'emplacement de ce puits . concurremment avec les explorations de la fosse N° 1 vers le Sud.
Le puits N° 3 fut ouvert en 1874 à 1,100 mètres au Sud du N° 1.
Il rencontra le calcaire carbonifère à 146 m. 44, et le terrain houiller à 155 m. 44.
Ce puits est actuellement approfondi à 325 m. 27, et a traversé plusieurs belles couches de houille, dont l'une extraordinaire, la Présidente, de 3 m. 60 d'épaisseur. C'est dans cette couche qu'est établie une communication avec la fosse N° 1.
En avril 1878 , on avait exploré la grande veine Présidente sur 367 mètres, dont la moitié cependant était en serrage. Cette veine découverte par la bowette sud du niveau de 196 mètres de la fosse N° 1, se présenta d'abord avec une épaisseur de 4 mètres, et fut suivi sur une certaine longueur avec cette épaisseur. Plus tard, on y rencontra des serrages successifs, entre lesquels la veine reparaissait, mais avec une épaisseur variable de 1 m. 50,1 m. 75 et 2 et 3 mètres.
En 1878, un incendie se déclara dans les remblais de la grande couche Présidente. Il fallu barrer le foyer de l'incendie, et par suite suspendre au moins momentanément les travaux dans cette couche.
Les explorations faites dans ces derniers temps ont aussi fait reconnaitre que les terrains de la fosse N° 3 sont accidentés.
Quatre accrochages ont été ouverts à 185, 227, 270 et 312 m.
Le puits N° 3, malgré l'irrégularité des terrains, s'annonce cependant comme possédant de grandes richesses, et devant fournir une exploitation fructueuse.
Il a couté de fonçage proprement dit ... . 644,942 fr. 04 et avec les installations 874,484 »
savoir :
1° Immeubles 44,482 fr. 44
2° Bâtiments de la fosse 78,582 86
3° Fonçages, sondages 644,942 04
4° Bâtiment des ateliers 9,156 21
5° Matériel d'extraction 90,625 85
6° Matériel du fond 6,694 96
Total 874,484 fr. 36 (1)
Une quatrième fosse a été ouverte en 1876 entre les fosses N° 1 et N° 2, dans la même position au Sud que la fosse N° 3. Elle est arrêtée à 37 mètres à cause de la crise industrielle.

 

Vuilemin Tome 1

 

Carte retravaillée par Monsieur Sulliger

fosse 2 de Auchy coupe Gallica Breton Ludovic

 

Les compositions des familles avant la catastrophe

Recensés à Lières en 1872 coron de la fosse

 

BROUILLARD Oscar né le 23 novembre 1844 à Fresnes sur Escaut (Nord)

Ouvrier mineur

 Fils de Constant BROUILLARD et de Rosalie VERNET

 Marié le 05 décembre 1872 à Liévin (Pas de Calais)

Avec Augustine CUVELIER née le 14 septembre 1845 à Denain (Nord)

Fille de Pierre Joseph CUVELIER et de Augustine FOUCART

 Une fille : Elodie Augustine née le 14 décembre 1873 à Lières (Pas de Calais) 

 

LESUR Pierre Jean Baptiste né le 09 janvier 1829 à Réty (Pas de Calais)

Ouvrier mineur

Fils de Pierre Joseph LESUR et de Flore DUBOIS

 Marié le 24 octobre 1858 à Bully  (Pas de Calais)

Avec GOULOIS Marie Louise Michelle née le 11 juin 1837 à Sailly en Ostrevent (62)

Fille de Constant GOULOIS et de Constance HENNEBIQUE

Quatre enfants :

Rose Flore Joseph née le 07 juin 1859 à Marles (Pas de Calais)

Alfred Jean Baptiste né le 28 novembre 1860 à Marles (Pas de Calais)

Adèle née le 19 décembre 1865 à Marles (Pas de Calais)

Marie Pascale Joseph née le 17 septembre 1871 à Auchy au Bois (Pas de Calais)

 

Recensés à Auchy au Bois en 1872 coron de la fosse 2

 

 

 

LEFEBVRE Jules né le 28 avril 1846 à Denain (Nord)

Ouvrier mineur

Fils de François Jules LEFEBVRE et de Sophie BLOTTEAU

 Marié le 09 août 1871 à Amettes (Pas de Calais)

Avec Adèle Estelle Joseph REANT née le 17 mai 1851 à Amettes (Pas de Calais)

Fille de Albert REANT et Florine COLLIER

 Deux enfants : Jules Charles Joseph né le 05 juin 1872 à Lières (Pas de Calais)

Elodie Elise née le 02 janvier 1874 à Lières (Pas de Calais)

 

LECONTE Henri né le 22 juillet 1836 à Fresnes sur Escaut (Nord)

Porion

Fils de Ambroise Ildephonse LECONTE et de Amélie LOUCHEUX

Marié le 17 août 1857 à Denain (Nord)

Avec Nathalie HOUDART née le 23 décembre 1836 à Denain (Nord) 

Fille de Louis HOUDART et de Virginie BLOTIAUX

Un fils : Ambroise Joseph né le 17 mai 1870 à Auchy au Bois (Pas de Calais)

 

REANT Scipion Régulus Joseph né le 16 mars 1844 à Ames (Pas de Calais)

Ouvrier mineur

Fils de Albert REANT er de Florine COLLIER

Marié le 07 août 1870 à Ferfay (Pas de Calais)

Avec LAVERSIN Honorine Célestine Joseph née le 06 février 1848 à St Venant (62)

Fille de Jules Cyrille Joseph LAVERSIN et de Célestine Joseph LHERBIER

Un fils : Raphaël Aimable né le 12 juin 1870 à Ferfay (Pas de Calais)

 

ROMIEU Lucien Marcel né le 21 janvier 1846 à Naves (Ardèche)

Sous ingénieur 

Fils de Frédéric ROMIEU et de Louise Henriette BELLON

Marié le 22 septembre 1868 à Vialas (Lozère)

Avec ROURE Louise née le 20 décembre 1847 à Vialas (Lozère)

Fille de François ROURE  et de Louise Victoire PLATON

 Un fils : Marcel François né le 14 novembre 1872 à Auchy au Bois ((Pas de Calais)

 

Recensé à Auchy au Bois en 1872 village père cabaretier

 

DAGBERT Louis Marie Joseph né le 25 juin 1850 à Hardinghen (Pas de Calais)

Ouvrier mineur

Fils de Joseph Henrice DAGBERT et de Marie Anne Pascale DHIEUX

 Célibataire

 

Autres catastrophes à Auchy

Le rapport d'accident dressé par l'ingénieur en chef des mines, suite au coup de grisou survenu à la fosse de Lières le 28 juillet 1875 qui fit 3 morts et 4 blessés graves, est significatif.

Après enquête, on incrimine l'accident à une lampe de mineur défectueuse (le fil de fer de serrage manquait). Qui est responsable, le surveillant DELFORGE qui n'a pas vérifié la présence de grisou le long des parois ? le mineur LEHU, propriétaire de la lampe, le lampiste FILBIEN qui n'aurait pas vérifié l'état de la lampe ou le réparateur de lampe THELLIER qui aurait oublié de mettre un fil de fer ?

Les 4 mineurs "auront à répondre devant la justice de leur conduite lors de l'accident", déclare l'ingénieur en chef.

Une récompense est sollicitée d'autre part pour M. BRETON, ingénieur de la compagnie, qui a opéré le sauvetage d'un ouvrier manquant à l'appel mais difficile de récompenser le directeur d'une compagnie où se sont produits trois accidents depuis sa nomination.

L'accident le plus redouté par les mineurs reste cependant l'explosion de grisou.

Quatre coups de grisou au moins ont touché les fosses de la compagnie mais il est très probable qu'il y en a eu d'autres : celui du 2 mai 1870 (sur lequel nous n'avons aucun renseignement), du 7 juin 1873 (fosse n°2 - 7 morts), du 9 mai 1875 (fosse n°2 - 2 morts) et du 28 juillet 1875 dont nous avons parlé plus haut (fosse n°1 - 3 morts).

Certaines familles furent particulièrement éprouvées à l'image de la famille BULTEL qui habite les corons de la fosse n"2 (village).

Pierre BULTEL, qui est marchand de légumes aux corons, perdit en 4 ans 2 fils et un beau-fils :

Edouard, 23 ans, dont nous avons déjà parlé, mort le 24 juillet 1871 à la fosse 2 en tombant d'une échelle, Gustave, 25 ans tué avec son beau-frère, Joseph DAGBERT, 22 ans, le 11 mai 1875 à la fosse n°2 victimes d'un coup de grisou. Le rapport d'accident conclut à la responsabilité du personnel : "le feu grisou s'est déclaré en allumant l'amadou pour mettre le feu aux mèches d'une mine" .

Joseph DAGBERT, une des deux victimes, était marié depuis un mois

La veuve DAGBERT, cabaretière à Auchy perdit deux enfants dans des accidents de mine :

Louis, 23 ans, tué au coup de grisou de 1873, Joseph, 22 ans, tué à celui de mai 1875, accident au cours duquel un troisième fils, Jules, 18 ans, fut blessé.

Elle perdit en outre, mais cette fois de maladie, son mari en 1874 (55ans), un autre fils, Henri, 31 ans, en 1879, sa fille Adèle, 21 ans, en 1880, son fils Jules, 27 ans en 1883.

On comprend pourquoi son fils cadet, Emile, seul survivant de cette famille, ne devint pas mineur.

Dans un rapport à son évêque, l'abbé FILLIERES, évoquant les nombreux accidents ayant touché les fosses d' Auchy et de Lières a ces mots terribles : "il y a bien eu des accidents les années dernières mais ils n'ont servi qu'à endurcir d'avantage".

 

Un complément sur http://gremine.skyrock.com/3147000320-Auchy-au-bois-catastrophe-miniere-du-7-juin-1873.html

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