CHAPITRE IV             RETOUR        ACCUEIL

 

BILLY-MONTIGNY OCCUPE ...

A la Mairie, comme dans toutes les communes de France, deux affiches blanches.

 

La première, l'ORDRE DE MOBILISATION GENERALE ; la seconde, un ORDRE DE REQUISITION.

 

 

 

ARMÉE de TERRE et ARMÉE de MER

ORDRE
DE MOBILISATION GÉNÉRALE

Par décret du Président de la République, la mobilisation

 des armées de terre et de mer est ordonnée, ainsi que la réquisition

 des animaux, voitures -et harnais nécessaires au complément

de ces armées

Le premier jour de la mobilisation est le dimanche deux août 1914.

Tout Français soumis aux obligations militaires doit,

 sous peine d'être puni avec toute la rigueur des lois, obéir aux

 prescriptions du FASCICULE DE MOBILISATION (pages

 coloriées placées dans son livret).

Sont visés par le présent ordre TOUS LES HOMMES

non présents sous les Drapeaux et appartenant:

1°) à l'Armée de TERRE y compris les TROUPES

COLONIALES et les hommes des

SERVICES AUXILIAIRES ;

2°) à l'Armée de MER y compris les INSCRITS

MARITIMES et les ARMURIERS de la MARINE.

Les Autorités civiles et militaires sont responsables

de l'exécution du présent décret.

 

Le Ministre de la Guerre          Le Ministre de la Marine

  

Le garde municipal passe dans les rues de Billy ­Montigny. A l'aide de son tambour, il bat le rappel, annonçant à la population l'ordre de mobilisation générale. La tristesse se lit sur tous les visages. Des larmes coulent ...

 

Les hommes mobilisés quittent leur famille ...

 

Les travailleurs étrangers et leurs familles sont parqués dans l'enceinte de l'école Voltaire, puis emmenés vers une destination Inconnue ….

 

Des familles évacuent ...

 

Quant à l'ordre de réquisition, il concerne certaines catégories de chevaux et juments, de mulets et mules. Ordre est donné à tout propriétaire de les présenter «avec bidon licol, pourvu d'une longe et ferrure en bon état »   au 3ème jour de la mobilisation aux lieu et heure indiqués sur l'affiche.

Le 6 août 1914, le Conseil municipal de Billy-Montigny se réunit en session extraordinaire. L'heure est grave.

 

Mais que craindre avec la force, la vaillance que représentent les troupes républicaines  « Elles gardent leur sang-froid et s'apprêtent à repousser avec fermeté l'invasion teutonne ».

 

Un conseiller municipal, Boilley, propose d'envoyer à ces troupes une adresse d'admiration et des vœux pour qu'elles ne connaissent que des jours de gloire : Vive la République, vive la France I La proposition de Boilley provoque l'enthousiasme et recueille l'assentiment unanime de l'Assemblée.

 

Le maire, Tournay, prend ensuite la parole. Il stigmatise la guerre : « Un des plus grands fléaux à redouter, capable d'amener la plus grande nécessité dans les familles privées de leurs soutiens, qui noblement les ont quittées pour se rendre à l'appel de la patrie menacée par les cohortes germaniques qui n'ont rêvé autre chose que de la démembrer ».

 

Dans de telles circonstances, un impérieux devoir s'impose à la municipalité

- pourvoir à tous les besoins de l'armée et de la population ;

 - lui assurer principalement son alimentation ;

- veiller à la salubrité des denrées et à ce qu'elles soient vendues à des prix raisonnables ;

- rappeler aux commerçants qu'ils oublieraient leurs devoirs de solidarité sociale en spéculant sur les moyens de la vie actuelle.

 

A cet effet, l'Assemblée nomme une commission chargée du ravitaillement de l'armée et de la population pendant la guerre.

Les épouses, les enfants, les vieux parents des soldats ne doivent pas souffrir d'un manque de subsistance. Le Conseil municipal décide en conséquence

 

- de fournir tous les jours le pain, dans les proportions de 500 grammes par tête de personne, aux familles dépourvues de ressources et dont le soutien a pris les armes ;

- de fixer à 0,20 F par jour et par personne le taux de secours en argent payable tous les samedis de chaque semaine.

Un agent, Guyot, a répondu héroïquement à l'ordre de mobilisation. Il est juste que la Patrie assure l'existence des familles de ceux qui risquent leur vie pour en assurer la défense. Le maire demande au Conseil de bien vouloir, dans un geste patriotique, maintenir le traitement de Guyot pendant le mois d'août 1914, proposition favorablement accueillie.

Battant en retraite, des soldats français, par petits groupes, traversent Billy-Montigny et se dirigent vers Lens. Les Allemands approchent.

Et la population civile de s'interroger sur les envahisseurs. Ce seraient des géants, écrasant tout sur leur passage ; ils couperaient la main droite de tous les hommes.

Des habitants quittent la ville. Des mineurs s'apprêtent également à partir, mais auparavant ils veulent toucher leur salaire.

A la fosse 10, certains viennent réclamer leur fiche de paie avant de passer à la caisse. Fernand, 15 ans, y est employé comme aide-comptable. A l'annonce de l'arrivée prochaine des Allemands, l'argent avait été mis en sécurité.

 

Inutile d'insister : on n'établit plus de fiches de salaire, on ne paye plus.

 

Les Allemands étaient annoncés ? Ils sont là. Ce 3 octobre 1914, il est trop tard pour fuir.

Fernand regagne son domicile à l'autre bout de la ville. Rasant les maisons, se cachant : un trajet interminable.

 

Sur la route, des hommes sont étendus. Morts. Des uhlans, à cheval, ont signé, leur passage.

 

Les troupes de choc suivent Des maisons sont brûlées. Les maisons non occupées sont déménagées de leur mobilier. L'abbé Sauvage, curé de la paroisse, est arrêté. La population se terre.

Quelques jours passent. Dans le lointain, du côté de Lorette, le canon gronde sans interruption. Le front se stabilise sur les collines de l'Artois.

Dans les maisons, des pièces sont réquisitionnées pour y loger un ou plusieurs soldats. Billy-Montigny devient lieu de repos, lieu de cantonnement. C'est l'occupation.

Et, assez rapidement, pour un certain nombre de familles la vie reprend un cours quasi normal. Les fosses ont rouvert leurs grilles. On embauche. On gagne sa vie, et les avantages en nature continuent à être délivrés.

 

Chaque mois, tous les citoyens de 16 ans et plus  vont se faire pointer à la  « Kommandantur » . Installée dans une maison de la route nationale (actuellement, no 59), non loin de la fosse 2.

 

Civils et soldats se côtoyant, s'habituent à se voir, se supportent.

 

La plupart des soldats ont une famille, reçoivent des colis dont ils partagent parfois le contenu avec les enfants du logis où Ils se trouvent,

Sur la route nationale passent des convois de blessés et de prisonniers. Bien des soldats allemands baragouinent le français, et certains de dire en s'adressant à leurs « hôtes forcés » : « Malheur la guerre ! Grand malheur ! »

 

Entre-temps qu'est devenu l'abbé Sauvage? Conduit à Lens, il a été d'abord dirigé sur Vitry, puis sur Cambrai et, de là, au camp de Gustrow dans le Grand-Duché de Mecklembourg où il mourut le 11 octobre 1914 des suites de privations ...

 

Intermédiaires entre l'envahisseur et la population, le maire et les conseillers municipaux. Sur les 21 membres de l'Assemblée communale, il ne reste plus que le maire, Tournay ; le 2ème adjoint, Broutin ; les conseillers municipaux Boilley et Choque. Les autres? Sous les drapeaux, ou évacués.

La Commune n'a plus d'argent. A l'approche de l'invasion allemande, les caisses publiques ont été évacuées. Impossible de verser aux familles des mobilisés les allocations auxquelles elles ont droit. L'existence de la population s'avère difficile.

Le maire rencontre Laveurs, Directeur de la Compagnie des Mines de Houille de Courrières, qui accepte, au nom de ladite Compagnie, de remettre à la Commune des bons de 20 F à concurrence d'une valeur de 30000 F remboursables après la guerre, sous réserve que la Commune garantisse le remboursement de cette somme.

 

La situation permettant de délibérer sans que le quorum légal soit atteint, l'Assemblée municipale, formée des quatre membres restants, se réunit le 17 octobre 1914. Elle autorise le maire à emprunter la somme de 30000 F aux conditions fixées par la Compagnie. Les bons émis seront frappés par la Commune d'un timbre spécial ; les sommes versées aux familles des mobilisés le seront à titre de simple avance récupérable sur les allocations dont elles seront bénéficiaires.

Plus tard, le maire reçoit l'ordre du commandant de la place, Von Batocki, de faire ensemencer en froment les parcelles de terre destinées à cette culture en 1915, et ce avant le 15 janvier 1915.

 

A cet effet, Tournay réunit les rares cultivateurs restés à Billy-Montigny. Ceux-ci acceptent de retourner à leurs champs, sous réserve d'avoir des bras et des chevaux. La Kommandantur  met à leur disposition quelques soldats et des chevaux de l'armée.

 

Autre problème : qui paiera les frais d'emblavure en cas de pertes des récoltes ? La Commune ? Le Conseil municipal, réuni extraordinairement le 4 janvier 1915, as montre satisfait quant à la prévoyance de l'Autorité allemande de ne pas laisser improductive la terre « nourricière de tous les êtres qu'elle porte ». Vu les avantages fournis par l'occupant, le Conseil requiert les cultivateurs d'exécuter les semailles à leurs risques. Cependant, pour ne pas les mettre dans d'embarras, le Conseil s'engage à solder les comptes créditeurs que ces cultivateurs pourraient avoir avec la Commune et à les rembourser du coût de leurs semences dans le cas seulement où elles seraient perdues par le fait de la guerre.

 

Les mois passent. Les fonds provenant de l'emprunt de 30000 F auprès de la Compagnie des Mines de Courrières ont été rapidement épuisés.

 

Billy-Montigny, toujours occupé, es trouve de nouveau désargenté. Impossible de payer les allocations aux familles des soldats mobilisés, aux vieillards, aux Infirmes, aux incurables privés de ressources. Impossible aussi de payer diverses pensions, les traitements des fonctionnaires, des employés et ouvriers municipaux.

Le maire propose à l'Assemblée communale, réunie le 4 février 1915, de créer un papier devant servir aux transactions commerciales et dénommé  « Bon Communal ». Le remboursement de ces bons serait garanti par la Commune, ou l'Etat, et s'effectuerait après la guerre, ou dès que les circonstances le permettraient.

Le Conseil vote ainsi une émission de 21600 bons pour une valeur totale de 50000 F (10000 bons de 1 F, 6000 bons de 2 F, 5 600 bons de 5 F) dont le secrétaire de Mairie est chargé de tenir la comptabilité.

 

Von Batocki réclame le versement d'une nouvelle contribution de guerre de 21000 F, sur une base approximative de 5 F par habitant, et ce dans un délai de 5 jours. Le maire plaide la situation des habitants ruinés. L'officier reste sourd : en aucune façon, il ne réduira la contribution demandée.

Le 4 février, le Conseil se réunit une nouvelle fois en séance extraordinaire. Comme il n'y a plus de maisons de crédits, il décide de procéder à une souscription publique. Tournay et Choque passeront chez tous les habitants non indigents pour leur demander de verser une quote-part. Le montant de cette souscription sera remboursé sous huitaine par des bons communaux dont la première émission est déjà épuisée. Le Conseil décide de ce fait de procéder à une deuxième émission de bons pour une valeur totale  de 52000 F.

Billy Montigny s'est maintenant doté d'une monnaie - papier. D'autres émissions de bons d'égale valeur suivront les 19 février et 16 mars.

Le 7 mai, le Conseil municipal votera une émission de bons pour un montant supérieur aux précédentes émissions, soit 112000 F, afin d'assurer le service des paiements du mois de juin d'une part, et de rembourser d'autre part l'avance faite en octobre par la Compagnie des Mines de Courrières pour le versement d'une contribution de guerre exigée par l'Autorité allemande ;

Depuis le 9 mai, la guerre fait rage sur les collines de l'Artois. Des files de soldats français prisonniers traversent Billy-Montigny à destination de l'Allemagne.

Le 1er juin, vers midi, un soldat allemand abat d'une balle en pleine tête l'un de ces prisonniers presqu'en face du no 129 de la rue nationale. Un tirailleur algérien. Il est enterré dans un champ bordant le route « sans plus d'égard que pour l'enfouissement d'un chien, ses meurtriers ne s'étant même pas trop assurés que la mort chez lui avait fait son œuvre .

Tournay fait part à Von Batocki de son indignation, demande l'exhumation du corps et son enterrement dans le cimetière communal. L'officier allemand n'a pas eu connaissance de ce drame. Il promet d'enquêter.

Entre-temps, le maire reçoit du Général, commandant le 6ème Corps de l'Armée allemande, une lettre remise par le Commandant de la place-sud de la ville, Le Général réclame le versement d'une somme de 300 à 500 F par jour pour le paiement des frais de nourriture et de solde des officiers du quartier sud de la ville. Sans en fixer le nombre, mais en fixant ces frais à 10 F par jour pour chacun d'eux.

Le maire convoque d'urgence le Conseil municipal.

 

La Commune, étant ruinée par des réquisitions aussi Importantes que variées, le Conseil, réuni le 17 juin, «  après avoir mûrement délibéré », déclare être dans l'Impossibilité absolue de supporter cette nouvelle charge sans recours à un emprunt ou être officiellement autorisé à mettre en circulation des bons de la Commune pour le paiement en question. Dans cette éventualité, le Conseil municipal prie le Commandant de la Place de vouloir délivrer un sauf-conduit au maire pour lui permettre de se rendre à Lille et rencontrer le préfet ou son représentent afin d'être instruit de ses droits et devoirs, et être autorisé è effectuer le paiement exigé.

Quant aux circonstances de la mort du tirailleur algérien, Von Batocki n'a pas donné signe de vie. «  Le Conseil municipal, après avoir commenté cet acte, décide d'exprimer au Commandant de la Place combien a été profonde son affliction le jour où il a appris cet attentat criminel contre le soldat qui après s'être livré à l'appel de la Patrie, combattu pour elle, rendu prisonnier et désarmé, ne pouvait légitimement de la part de ses CONFRERES d'armes, subir ce sort misérable, qu'au contraire dans une idée chevaleresque de leur part qu'être objet d'un sentiment de compassion et d'admiration.

Souhaite dans l'intérêt de l'Armée allemande qui a réputation dans le monde d'être placée au premier rang des nations civilisées,

Que pareil acte ne se renouvelle plus, et pour garder en mémoire le nom de ce martyr prend l'initiative de lui ériger sur sa tombe, une pierre tumulaire dont les frais seront demandés aux habitants par souscription

Pour pallier le manque de numéraire qui paralyse la vie économique des communes occupées, la ville de Lille émet des bons communaux qu'elle met à la disposition des communes pour faire face aux besoins indispensables. Le taux d'intérêt (2 '%) représente les frais de service de l'émission. »

Le Conseil municipal, réuni le 24 juillet, autorise le maire à solliciter de la ville de Lille un prêt de 90000 F. En garantie du remboursement de cette somme, le Conseil vote un emprunt de même montant à contracter après la guerre auprès du Crédit Foncier de France ou de tout autre organisme prêteur.

Successivement, le Conseil municipal vote des emprunts de 90000 F les 26 août et 10 octobre, un emprunt da 80000 F le 6 novembre, un nouvel emprunt de 90000 F le 29 novembre et un emprunt de 120000 F le 23 décembre pour assurer les paiements du mois de janvier 1916:

 

- Frais d'entretien des troupes et officiers                                                     

(somme exigée) ...........................................................................................70 000 F

- Frais de charbon pour le chauffage

des soldats allemands                                                                                  25 000 F

- Pour les services municipaux .................................................................. .25 000 F

 

Entre-temps, pour assurer la survie de la population, des denrées américaines sont distribuées ou vendues par l'intermédiaire de la Commission «  for in Belgium » . Les rations individuelles en pain sont augmentées : elles passent de 1 800 g à 2 400 g par semaine. Une amélioration obtenue grâce au député-maire de Lens, Basly.

 

Mais la misère est là : les habitants indigents sont une charge. De plus, la présence d'habitants atteints d'une maladie grave, de tuberculose notamment, s'avère dangereuse pour la santé de la population et des troupes.

 

La Kommandantur  adresse au maire une note aux termes de laquelle les habitants indigents et malades ont la possibilité de gagner la France non occupée par la Suisse. Le maire en avise la population. 200 habitants environ se font inscrire pour le voyage.

Dans cette note, il est en outre précisé que les autorités locales ont toute latitude de proposer l'évacuation d'office de certaines personnes. Réuni le 11 décembre, le Conseil municipal déclare qu'il n'a pas è désigner de personne pour laquelle une mesure d'expulsion pourrait être prise. Par contre, il décide d'accorder à un Indigent qui sollicite son évacuation une somme de 20 F, dépense à faire supporter par le bureau de Bienfaisance.

Billy-Montigny, éloigné du front d'Artois d'une dizaine de kilomètres, devient très vite un centre de regroupement des soldats blessés.

 

Rassemblés en un premier temps è l'école Voltaire, les moins graves d'entre eux sont acheminés vers un château aménagé en hôpital, sis au no 100 (actuel) de la route nationale ; quant aux blessés graves, Ils sont transportés au château du Directeur Laveurs ayant accès sur l'avenue de la fosse 2, et dont les aborde sont calmes.

 

Après les offensives de mai et de juin, les morts ne se comptent plus. A bref délai, le cimetière de Billy­Montigny sera comblé. Ainsi que les cimetières environnants.

 

Le maire reçoit à ce sujet une lettre de l'inspecteur de l'ambulance no 7 du 6ème Corps d'armée demandant à la ville de lui fournir un terrain convenable destiné à suppléer à l'insuffisance des cimetières actuels. Rendez-vous pris avec le maire, cet inspecteur, qui a reçu tous pouvoirs, choisit une prairie attenant au cimetière, prairie appartenant à la Compagnie des Mines de Courrières.

Le Conseil municipal, réuni le 26 juillet, «  regrette que les intérêts de la Commune n'aient pas été mieux compris de la part de la Kommandantur qui aurait, dans la continuation du cimetière jusqu'aux voies ferrées de la Compagnie du Chemin de Fer du Nord, trouvé le terrain qui lui convenait au prix des terres labourables, aussi bien que dans la propriété en bordure de la rue de l'Egalité qui vaut au moins 5 F le centiare ».

Le maire ayant été requis pour négocier l'acquisition envisagée par les autorités allemandes, le Conseil municipal le charge de se mettre en rapport avec le Directeur de la Compagnie des Mines de Courrières et de faire le nécessaire pour aboutir à la conclusion de l'affaire ...

 

Augustin a cinq ans. Il habite une maison de coron proche du château Lavaurs. Il siffle comme un rossignol, et déjà la musique l'attire. Qui ne le reconnaît?..

L'école est fermée pour les élèves de son âge. Que faire parfois pour tromper l'ennui?

Dès que les accents funèbres d'une musique militaire lui parviennent aux oreilles, il accourt vers l'avenue de la fosse 2 et accompagne le cortège jusqu'au cimetière.

 

Augustin ne rate aucun enterrement (mais en cachette de ses parents, car ...). Qu'aurait-on pu faire pour l'en empêcher? Il est né, musicien!

 

Aujourd'hui encore, il peut vous fredonner le chant « Der gute Kamerad » dont la musique marque les funérailles des militaires morts «  pro patria ». Derrière la grille du «  Deutscher Soldatenfriedhof », rue de l'Egalité, écoutons ce chant d'Uhland repris en chœur au moment de l'inhumation.

 

 

1

Ich halte einen Kameraden,                            J'avais un camarade,

Einen bessern findst du nicht.                         Tu n'en trouveras pas de meilleur.

Die Trommel schlug zum Streite.                     Le tambour battit pour le combat.

Er ging an meiner Seite                                    Il marchait à mes côtés

in gleichen Schritt und Tritt.                              D'un mime pas.

2

Elne Kugel kam geflogen ;                              Un boulet arriva à toute volée ;

Gilt es mir Oder gilt es dir ?                             Est-ce pour moi ou est-ce pour lui

Ihn hat es weggerissen,                                  C'est lui qui est abattu,

Er liegt mir vor den Füßen ;                             II gît à mes pieds ;

Als wäres ein Stück von mir.                            Comme si c'était un morceau de moi.

3

Will mir die Hand noch reichen,                       II veut encore me tendre la main,

Derweil ich eben lade :                                     C'est pourquoi je lui dis

« Kann dir die Hand nicht geben ;                  « Je ne peux pas te donner la main ;

Bleib du im ew'gen Leben,                               Demeure dans la vie éternelle,

Mein guter Kamerad ! ».                                   Mon bon camarade ».
 

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